02-09-2025 09:12 - Lettre Ouverte à SEM Mohamed Cheikh Ould Ghazouani, Président de la République Islamique de Mauritanie

Lettre Ouverte à  SEM Mohamed Cheikh Ould Ghazouani, Président de la République Islamique de Mauritanie

Objet : Dénonciation d’une rencontre divisionnaire tenue à Sélibaby le 31 août 2025

Excellence Monsieur le PrÈsident,

Nous, organisations de défense des droits humains :

- Association Mauritanienne pour l'éradication de l'Esclavage et ses Séquelles (AMEES)

- Union des Volontaires pour le Développement et Bonnes Actions (UVDS)

- Ganbanaaxu Fedde Mauritanie

- Association des Ressortissants Mauritaniens pour l’Éradication de la Pratique de l’Esclavage et ses Séquelles section de France (AREMPES-France)

portons respectueusement à votre haute attention, ainsi qu’à celle de l’opinion nationale et internationale, un fait d’une extrême gravité survenu ce dimanche 31 août 2025 à l’hôtel Wagadou de Sélibaby.

En effet, une rencontre y a été organisée entre un Élu de la région et le Vice-président de l’Assemblée nationale, l’honorable député Sidney Sokhona, tristement connu pour son passè esclavagiste, ses pratiques divisionnaires et ségrégationnistes, entouré de ses proches collaborateurs. Cette réunion a impliquè certains de nos frères SoninkÈ, présents comme des "chefs de village", alors même que dans le Guidimakha chaque village est confronté à la douloureuse réalité de chefferies parallèles, sources de tensions, de frustrations et de divisions profondes.

Excellence,

Depuis 2016, lorsque les descendants d’esclaves ont décidé de rompre avec les coutumes esclavagistes, une partie des anciens maîtres s’est révoltée en affirmant que les terres agricoles, les mosquées et la gestion communautaire leur appartiendraient exclusivement, et que nul descendant d’esclave ne pourrait y prétendre à moins d’accepter ce statut humiliant.

Concernant la chefferie traditionnelle, la règle veut que le plus âgé du village en devienne chef. Mais, dans les faits, lorsqu’il s’agit d’un descendant d’esclave, cette règle est bafouée. Ainsi, chaque village soninké du Guidimakha se retrouve aujourd’hui avec deux chefferies rivales, situation intenable qui alimente rancunes et conflits.

À titre d’exemple, le 25 janvier 2025, dans le village d’Arr — chef-lieu de la commune et du département de Wompou —, une cérémonie d’intronisation du chef coutumier, M. Bilaly Souleymane Soumaré, a eu lieu. Or, un certain Mamadou Wagui Camara, se présentant comme représentant des chefs de village du Guidimakha, a profité de l’occasion pour tenir un discours public faisant l’apologie de l’esclavage. Il y a affirmé que seuls les porteurs des noms de famille Soumaré, Camara, Gandéga, Djabira et Diawara seraient légitimes à exercer le pouvoir coutumier dans la région.

À cette situation déjà préoccupante est venue s’ajouter la rencontre du député Sidney Sokhona — objet de la présente lettre — avec certains chefs de village issus de ces familles. Dans son allocution, il a déclaré qu’en l’absence du maire, le pouvoir revient exclusivement aux chefs traditionnels et aux imams. Une telle démarche ne vise qu’à légitimer une chefferie ségrégationniste, au détriment de l’égalité et de l’unité communautaire.

Excellence, Nous dénonçons avec la plus grande fermeté ces assises qui visent non pas à apaiser les différends, mais à institutionnaliser la division, légitimer l’exclusion et fragiliser la cohésion sociale. Elles sont en totale contradiction avec les principes de justice, d’égalité et de réconciliation que vous avez toujours affirmé comme socle de votre projet pour une Mauritanie unie, inclusive et pacifiée.

La chefferie traditionnelle, en Mauritanie, ne doit en aucun cas devenir un instrument de domination, d’asservissement ou de ségrégation. La tentative de valider, par des rencontres partisanes et clandestines, une chefferie au détriment d’une autre, représente une menace directe pour la paix sociale et la stabilité de toute la région.

Nous rappelons également vos discours tenus lors des cérémonies des villes anciennes à Ouadane, Oualata et Djowol, riches de lucidité et de sagesse, en parfaite adéquation avec les principes de notre sainte religion, l’islam, qui place l’égalité entre les êtres humains au cœur de ses valeurs. Ce combat pour l’égalité absolue est aussi le nôtre.

Toutefois, Excellence, permettez-nous de vous signaler que les véritables problèmes qui déchirent la communauté soninkÈ depuis 2016, sur fond de pratiques esclavagistes, sont souvent camouflés ou déformés dans leur présentation. La réalité est pourtant visible à travers les nombreux contentieux portés devant les tribunaux, en particulier celui de Sélibaby. Nous comptons sur votre clairvoyance et votre autorité pour régler définitivement cette question qui menace la paix et la justice.

En conséquence, nos organisations appellent solennellement votre haute autorité à :

 Mettre un terme à ces initiatives divisionnaires qui sapent les fondations mêmes de l’unité nationale ;

 Garantir l’égalité et la dignité de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de statut ou d’appartenance communautaire ;

 Engager un dialogue inclusif, transparent et républicain afin de trouver une solution durable et équitable à la question des chefferies dans le Guidimakha.

Nous tenons enfin à vous exprimer notre gratitude pour l’esprit d’ouverture et de démocratie que vous incarnez. Mais nous demeurons préoccupés par certains manquements qui nécessitent des corrections urgentes, afin de renforcer la confiance et de consolider l’unité nationale.

Nous réaffirmons, en tant qu’organisations de défense des droits humains, notre engagement indéfectible pour une Mauritanie débarrassée de l’esclavage, des discriminations et des divisions, et résolument tournée vers la justice, la cohésion et la paix.

Veuillez agréer, Excellence Monsieur le Président, l’expression de notre très haute considération.

Fait à Nouakchott, le 1er septembre 2025

Pour les organisations signataires :

AMEES : Diarra Sadifou +222 46 41 72 38

UVDS : Yakhoub Bakhayokho +222 46 53 90 62

GANBANAXUN FEDDE Mauritanie : Abdallahi Sidi Traoré +222 46 84 00 73

ARMEPES-France :Aboulaye Traoré +33 7 51 34 19 12





Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


Source : Abou Sy
Commentaires : 1
Lus : 1250

Postez un commentaire

Charte des commentaires

A lire avant de commenter! Quelques dispositions pour rendre les débats passionnants sur Cridem :

Commentez pour enrichir : Le but des commentaires est d'instaurer des échanges enrichissants à partir des articles publiés sur Cridem.

Respectez vos interlocuteurs : Pour assurer des débats de qualité, un maître-mot: le respect des participants. Donnez à chacun le droit d'être en désaccord avec vous. Appuyez vos réponses sur des faits et des arguments, non sur des invectives.

Contenus illicites : Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes ou antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d'une personne, utilisant des oeuvres protégées par les droits d'auteur (textes, photos, vidéos...).

Cridem se réserve le droit de ne pas valider tout commentaire susceptible de contrevenir à la loi, ainsi que tout commentaire hors-sujet, promotionnel ou grossier. Merci pour votre participation à Cridem!

Les commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.

Identification

Pour poster un commentaire il faut être membre .

Si vous avez déjà un accès membre .
Veuillez vous identifier sur la page d'accueil en haut à droite dans la partie IDENTIFICATION ou bien Cliquez ICI .

Vous n'êtes pas membre . Vous pouvez vous enregistrer gratuitement en Cliquant ICI .

En étant membre vous accèderez à TOUS les espaces de CRIDEM sans aucune restriction .

Commentaires (1)

  • Mokhoni (H) 02/09/2025 12:02 X

    Il est temps que les servces de renseignements disent la vérité aux hautes autorités de l Etat.C est à dire que les feodaux ne contrôle plus rien au Guidimagha.