26-03-2025 14:54 - Les Députés d’Abyssinie : Le Droit des parlementaires mauritaniens de dénoncer l'Injustice à l’Étranger. Par Pr ELY Mustapha

Les Députés d’Abyssinie : Le Droit des parlementaires mauritaniens de dénoncer l'Injustice à l’Étranger. Par Pr ELY Mustapha

Pr. ELY Mustapha -- Cet article examine les fondements juridiques, constitutionnels et religieux qui sous-tendent le droit et la responsabilité des députés mauritaniens à dénoncer les injustices socio-économiques, tant au niveau national qu'international.

L'analyse s'appuie sur le cadre constitutionnel, les obligations internationales, les principes de la Charia.

Le Cadre constitutionnel et juridique Mauritanien

Le système juridique mauritanien est fondamentalement de type moniste. Selon ce principe, les traités internationaux ratifiés par la Mauritanie font automatiquement partie intégrante du droit interne dès leur ratification, sans nécessiter de transposition par un acte législatif supplémentaire.

L'État mauritanien affirme lui-même que « en raison du système moniste qui prévaut, les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ratifiés par le pays sont incorporés dans l'ordre juridique interne conformément à l'article 80 de la Constitution ».

La Constitution de la République Islamique de Mauritanie, dans son préambule, proclame solennellement l'attachement du pays à l'Islam et aux principes démocratiques définis par la Déclaration Universelle des droits de l'homme de 1948 et la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981, ainsi qu'aux autres conventions internationales auxquelles la Mauritanie a souscrit. Ce fondement constitutionnel établit clairement l'engagement du pays envers les principes universels de droits humains.

Cependant, une contradiction persiste dans l'application de ces principes. Bien que le monisme suppose théoriquement la primauté du droit international, le gouvernement mauritanien défend souvent la primauté de sa Constitution, dont la Charia est présentée comme l'unique source de droit, sur les instruments juridiques internationaux ratifiés. Cette ambivalence crée un cadre juridique complexe où les droits fondamentaux, dont celui de dénoncer l'injustice, se trouvent dans une zone d'interprétation contestée.

La Primauté contestée du Droit International

Dans la pratique, l'application de la primauté du droit international en Mauritanie présente des contradictions significatives. Théoriquement, les dispositions des traités relatifs aux droits humains, y compris la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, sont d'application directe au sein de l'État et peuvent être invoquées devant les tribunaux.

Cependant, les exemples concrets d'application sont rares, voire inexistants. Le gouvernement mauritanien a souligné dans le cadre de sa collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) que le préambule de la Constitution consacre la primauté de la Constitution, dont la Charia est l'unique source de droit, sur les instruments juridiques internationaux ratifiés.

Cette position crée un paradoxe juridique où le principe moniste est affirmé mais partiellement appliqué dans la pratique. Cette tension entre droit international et droit interne a des implications directes sur la liberté d'expression des députés et leur capacité à dénoncer les problèmes sociaux et économiques du pays, particulièrement à l'étranger.

La Charia comme Source de Droit : Obligation de dénoncer l'Injustice

Puisque la Charia constitue la source principale du droit mauritanien, il est essentiel d'examiner ce que les textes islamiques prescrivent concernant la dénonciation de l'injustice.

Fondements Coraniques

Le Coran établit clairement l'obligation pour les croyants de défendre la justice : « Ô vous qui avez cru, soyez fermement attachés à la justice, témoins pour Allah, même si c'est contre vous-mêmes, vos parents ou vos proches. Qu'il s'agisse d'un riche ou d'un pauvre, Allah a priorité sur eux deux ». Ce verset (4:135) établit sans ambiguïté l'obligation de témoigner pour la justice, même contre ses propres intérêts ou ceux de ses proches.

Hadiths et Jurisprudence Islamique

Cette obligation est renforcée par plusieurs hadiths authentiques. Abû Bakr Aṣ-Ṣiddîq (qu'Allah l'agrée) rapporte avoir entendu le Prophète dire : « Lorsque les gens voient l'injuste [commettre l'injustice] et ne l'en empêchent pas, peu s'en faut qu'Allah ne les saisisse tous d'un châtiment venant de Lui ». Ce hadith, considéré comme authentique et rapporté par plusieurs compilateurs, dont At-Tirmidhî et Abû Dâwud, montre clairement la responsabilité collective face à l'injustice.

Un autre hadith fondamental établit une hiérarchie dans la lutte contre l'injustice : « Que celui d'entre vous qui voit un mal le change par sa main. S'il ne le peut pas qu'il le dénonce. S'il ne le peut pas qu'il le désapprouve en son cœur car c'est la plus faible expression de la foi ». Cette tradition prophétique, rapportée par Mouslim, établit la dénonciation verbale comme le deuxième niveau d'action contre l'injustice, lorsque l'intervention directe n'est pas possible.

Ce principe d'engagement contre l'injustice est d'autant plus contraignant pour ceux qui occupent des positions d'autorité ou de représentation, comme les députés. Un député, ayant reçu un mandat de représentation du peuple, porte une responsabilité particulière dans la défense des droits de ses électeurs et la dénonciation des injustices qu'ils subissent.

Cas Concrets de députés mauritaniens

Un exemple particulièrement éclairant est celui de Khally Diallo, député mauritanien élu en mai 2023 sous la bannière du Front Républicain pour l'Unité et la Démocratie (FRUD). Contrairement à une opposition traditionnelle parfois qualifiée de complaisante, Diallo s'est distingué par « sa fermeté morale et son refus catégorique de toute compromission » face aux injustices structurelles.

Par ses interventions à l'Assemblée nationale, il a mis en lumière « des réalités dérangeantes telles que les discriminations institutionnalisées dans l'administration publique, la marginalisation systématique de certaines communautés ethniques et la persistance de pratiques esclavagistes pourtant officiellement abolies ». Il a notamment dénoncé « la sous-représentation flagrante des Mauritaniens noirs dans les hautes fonctions administratives, preuve tangible d'une discrimination institutionnelle persistante ».

Cet engagement, qualifié de « cri d'alarme sur l'urgence d'un changement systémique en Mauritanie », appelle à « une refonte complète du contrat social national, basée sur la justice, l'équité et la transparence ». Il illustre parfaitement la mise en application du devoir islamique de dénoncer l'injustice par un représentant élu.

Manifestations Parlementaires contre les Modifications Constitutionnelles

En janvier 2019, un autre exemple significatif s'est produit lorsque des députés de l'opposition sont sortis de l'hémicycle pour se joindre à des manifestants qui protestaient contre une initiative visant à modifier la constitution pour supprimer la limitation des mandats. Ces députés « se sont déclarés hostiles à cette initiative » de révision constitutionnelle.

Cet acte de protestation publique illustre comment des représentants élus peuvent utiliser leur position pour s'opposer à des modifications perçues comme injustes du cadre légal fondamental.

Réactions historiques des autorités aux dénonciations d'Injustice

L'attitude des autorités mauritaniennes face aux dénonciations d'injustices présente un tableau préoccupant de restrictions des libertés fondamentales.

Restrictions Législatives sur la Liberté d'Association

En 2016, le parlement mauritanien a approuvé un projet de loi restreignant les droits à la liberté de réunion et d'association, sans consultation publique préalable. Cette loi confirme « la singularité de la Mauritanie où, jusqu'à présent, la création d'une association est soumise à une autorisation étatique »7.

Amnesty International et une vingtaine d'organisations de la société civile ont dénoncé cette loi qui continue « de restreindre l'espace civique déjà limité ». Dans son rapport, Amnesty International a documenté « les cas d'au moins quatre organisations qui peinent toujours à recevoir leur autorisation malgré le dépôt de statuts en bonne et due forme »7. Cette restriction systématique du droit d'association limite considérablement la capacité des citoyens et de leurs représentants à s'organiser pour dénoncer collectivement les injustices.

Répression des Voix Critiques

Sous la présidence de Mohamed Ould Abdel Aziz (avant juin 2019), le bilan en matière de droits humains a été qualifié de « déplorable ». Durant cette période, « des personnes sont régulièrement poursuivies pour avoir exprimé pacifiquement des opinions dissidentes et des critiques à l'égard de l'État et de ses représentants ».

Plus préoccupant encore, « les journalistes et les militants des droits humains qui dénoncent les phénomènes d'exclusion ou des affaires de corruption sont régulièrement victimes d'abus policiers, de harcèlement judiciaire et de détention arbitraire ».

Ce climat répressif s'est également manifesté dans la réaction aux manifestations du mouvement « Touche pas à ma nationalité ». Le gouvernement a qualifié ces manifestations d'« activités non autorisées, où des étrangers jouaient, sans équivoque le rôle d'encadreurs », menaçant de sanctionner « sévèrement » les participants, en dépit de leurs revendications légitimes concernant les procédures de recensement des citoyens.

Analyse Comparative et Perspectives

Principes Politiques et Éthiques en Jeu

Les tensions entre le droit des députés à dénoncer l'injustice et les restrictions imposées par les autorités mauritaniennes reflètent un conflit fondamental entre plusieurs principes :

1. L'immunité parlementaire : Théoriquement, les députés jouissent d'une protection dans l'exercice de leur fonction représentative, qui devrait inclure la liberté d'expression et de dénonciation.

2. L'éthique islamique de justice : La Charia, source principale du droit mauritanien, impose clairement l'obligation de dénoncer l'injustice, particulièrement pour ceux en position d'autorité.

3. Les obligations internationales : En tant que signataire de nombreux traités internationaux relatifs aux droits humains, la Mauritanie s'est engagée à protéger la liberté d'expression et le droit de participation politique.

4. La souveraineté nationale : Les autorités invoquent souvent ce principe pour limiter ce qu'elles considèrent comme des ingérences étrangères, notamment lorsque des critiques sont formulées à l'international.

Fondements Coraniques et Prophétiques du Devoir de Dénonciation de l'Injustice en Islam

I. Principes Coraniques : L'Impératif de Justice Universelle

1. L'Exigence Absolue de Justice (Al-'Adl)

Coran 4:135 :

"Ô vous qui croyez ! Observez strictement la justice et soyez des témoins (véridiques) comme Allah l'ordonne, fût-ce contre vous-mêmes, vos parents ou proches..." Ce verset établit un devoir sacré de témoigner pour la justice, même contre ses intérêts tribaux ou familiaux. Le commentateur Ibn Kathir souligne que ce verset "abroge toute solidarité clanique contraire à la vérité".

Coran 5:8 :

"Que la haine envers un peuple ne vous incite pas à être injustes. Soyez justes : cela est plus proche de la piété."

L'exégète Al-Qurtubi explique que ce commandement s'applique particulièrement aux détenteurs d'autorité, les obligeant à protéger toutes les communautés, y compris les non-musulmans.

2. L'Interdiction de la Complicité Silencieuse

Coran 8:25 :

"Et craignez une calamité qui n'affligera pas exclusivement les injustes d'entre vous." Selon l'imam Ash-Shawkānī, ce verset condamne l'inaction face à l'injustice, y compris lorsqu'elle ne touche pas directement sa communauté.

Coran 49:6 :

"Ô vous qui croyez ! Si un pervers vous apporte une nouvelle, vérifiez-la..." Ce verset, souvent cité dans les débats sur la liberté d'expression, impose un devoir actif de vérification et de dénonciation des fausses informations au service du pouvoir.

II. Hadiths Prophétiques : La Dissidence comme Acte de Foi

1. La Parole Juste Face au Pouvoir Tyrannique

Sahih Muslim 49 :

"Le meilleur jihad est une parole de vérité devant un souverain injuste." Ce hadith authentique fait de la dénonciation publique des abus un acte supérieur de piété, validé par les oulémas contemporains comme Yusuf Al-Qaradawi.

2. La Responsabilité Collective

Sunan Abi Dawud 4336 (authentifié par Al-Albani) :

"Quiconque parmi vous voit un mal, qu'il le change par sa main. S'il ne peut, alors par sa langue. S'il ne peut, alors par son cœur - et c'est le plus faible degré de foi." L'imam An-Nawawi dans Sharh Sahih Muslim précise que ce devoir s'impose sans distinction d'appartenance communautaire.

3. L'Universalisme de la Justice

Musnad Ahmad (jugé sahih par Shu'ayb Al-Arna'ut) :

Le Prophète (PSL) dit : "Aidez votre frère, qu'il soit oppresseur ou opprimé." Les compagnons demandèrent : "Ô Messager d'Allah, nous comprenons aider l'opprimé, mais comment aider l'oppresseur ?" Il répondit : "En l'empêchant d'opprimer."

Ce hadith fonde juridiquement le droit - et le devoir - de s'opposer aux abus de pouvoir, y compris au sein de son propre groupe.

III. Pratiques des Compagnons : Modèles de Dissidence Sacrée

1. Abu Bakr As-Siddiq et la Redevabilité des Dirigeants

Lors de son discours d'intronisation, le premier calife déclara :

"Si j'agis bien, aidez-moi. Si j'agis mal, redressez-moi." (Al-Bidaya wa An-Nihaya, Ibn Kathir). Ce principe deviendra la base du contrôle citoyen du pouvoir en droit constitutionnel islamique.

2. Umar ibn Al-Khattab et la Justice Transcommunautaire

Le deuxième calife interpella publiquement un gouverneur égyptien :

"Depuis quand asservis-tu les gens alors qu'ils sont nés libres de leurs mères ?" (Al-Iqd Al-Farid, Ibn Abd Rabbih).

Cet épisode historique fonde l'obligation de défendre les droits des minorités non arabes.

3. Bilal ibn Rabah : Symbole de la Lutte Antiraciste

L'ancien esclave éthiopien, devenu muezzin du Prophète, incarna la dénonciation des discriminations. Son célèbre reproche à Abu Dharr Al-Ghifari : "Ressens-tu de la supériorité à cause de ta mère ?" (Sahih Al-Bukhari 30) devint un paradigme juridique contre le tribalisme.

IV. Jurisprudence Islamique (Fiqh) : Les Règles de la Dissidence Légitime

1. La Hisba : Commandement du Bien et Interdiction du Mal

Le juriste hanbalite Ibn Taymiyyah écrit dans Al-Hisba fi Al-Islam :

"Celui qui détient une autorité (wali al-amr) doit écouter les doléances du peuple et réformer les injustices, qu'elles émanent de ses proches ou de ses adversaires."

2. Conditions de la Dénonciation Publique (Selon Al-Ghazali)

Dans Ihya Ulum Ad-Din, il énumère 4 conditions pour dénoncer une injustice :

1. Connaissance certaine du tort
2. Absence d'alternative discrète
3. Proportionnalité des moyens
4. Persistance du mal après avertissement

2. La Primauté de la Justice sur la Solidarité Tribale

Le malikite Al-Qarafi stipule dans Al-Furuq :

"Le témoignage contre son propre clan, lorsqu'il s'agit de préserver les droits d'autrui, est une obligation plus forte que le silence complice."

En conclusion voilà donc une Éthique Islamique de la Dissidence

L'islam construit une théologie de la responsabilité sociale où le silence face à l'injustice équivaut à une complicité spirituelle.

Comme le résume le Coran 5:105 :

"Ô vous qui croyez ! Vous êtes responsables de vous-mêmes. Celui qui s'égare ne pourra vous nuire si vous êtes bien guidés."

Cette guidance implique, selon l'interprétation dominante des écoles malikite et hanbalite, un devoir actif de réforme sociale transcendant toutes les affiliations tribales ou partisanes.

La tradition prophétique et l'histoire islamique ne nous offrent-ils pas ainsi un cadre sacré légitimant - et même exigeant - la dénonciation courageuse des abus de pouvoir.

Cas Concrets des Compagnons du Prophète dans la Lutte contre l'Injustice (Sources Sunnites)

1. Abû Bakr Aṣ-Ṣiddîq et la Réconciliation avec 'Umar : Modèle de Correction des Torts

Lors d'un conflit entre Abû Bakr et 'Umar ibn Al-Khaṭṭâb, ce dernier refusa initialement d'accepter les excuses d'Abû Bakr. Le Prophète Muḥammad (PSL) intervint en rappelant la primauté de la justice sur les rancoeurs personnelles : « Allah m'a envoyé (comme Prophète) à vous, mais vous m'avez dit : "Tu mens", tandis qu'Abû Bakr a dit : "Il a dit la vérité" »

. Cette scène montre deux aspects cruciaux :

• L'obligation de rectifier ses torts, même entre dirigeants (Abû Bakr reconnaît avoir été « plus injuste »).

• Le rôle médiateur du Prophète pour rétablir la cohésion communautaire face aux dissensions.

2. Intervention Prophétique contre l'Injustice Financière

Un créancier venu réclamer une dette à Abû Jahl, ennemi juré de l'Islam, reçut l'appui inattendu du Prophète (PSL) :

« Le Prophète accompagna le créancier chez Abû Jahl et exigea le paiement intégral de la dette » .

Cet acte illustre :

• Le devoir de défendre les droits des opprimés, indépendamment des affiliations idéologiques.

• La neutralité active en matière de justice, transcendant les conflits personnels.

3.Aichha bint Abi Bakr : Avocate des Femmes Opprimées

'Â'ishah (رضي الله عنها) intervint en faveur d'un groupe de femmes maltraitées par leurs maris : « Elle plaida leur cause avec véhémence, utilisant son influence pour obtenir réparation »

Son action démontre :

• La légitimité de l'intervention des autorités religieuses en cas d'injustice domestique.

• L'application concrète du hadith : « Aidez votre frère, qu'il soit oppresseur ou opprimé » (en empêchant l'oppression).

En effet L’obligation est de combattre les injustices, et de délivrer les musulmans de l’oppression. Aicha - que Dieu soit satisfait d’elle - a relaté que le Prophète – que les prières de Dieu soient sur lui – a dit : « Viens en aide à ton frère, qu’il soit oppresseur ou opprimé. S’il est oppresseur, retiens ses mains [afin qu’il ne puisse commettre d’actes injustes] ; s’il est victime d’oppression, exige son dû pour lui. »

Et Ḥumayd rapporte une tradition sous l’autorité d’Anas. Il dit : Le Prophète (PSL) a dit : « Viens en aide à ton frère, qu’il soit oppresseur ou opprimé ». On lui demanda : « Ô Envoyé de Dieu ! L’opprimé, nous viendrons à son aide ; mais l’oppresseur, comment l’aiderons-nous ? » Il leur répondit (PSL): « Vous l’empêcherez d’opprimer, et c’est de cette façon que vous l’aiderez. »

3. Sa'îd ibn Jubayr : Défi à la Tyrannie d'Al-Ḥajjâj

Face à Al-Ḥajjâj ibn Yûsuf, gouverneur réputé pour sa brutalité, Sa'îd ibn Jubayr (رضي الله عنه) refusa catégoriquement de se taire :

« Si je pensais que tu avais le pouvoir de prendre ma vie, j'aurais adoré toi au lieu d'Allah ». Son martyre (exécuté en 95 AH) symbolise :

• L'interdiction absolue de pactiser avec les tyrans, même sous menace de mort.

• La validation coranique : « N'incline pas vers les injustes, sinon le Feu te touchera » (Coran 11:113)

. 4. Al-Mughîrah ibn Shu'bah : Défense Physique de l'Honneur Prophétique

Lors des négociations de Hudaybiyyah, Al-Mughîrah ibn Shu'bah (رضي الله عنه) frappa la main de 'Urwah ibn Mas'ûd qui tentait de toucher la barbe du Prophète (PSL) :

« Ôte ta main de la barbe du Messager d'Allah ! »

. Cet épisode souligne donc :

• La protection active de la dignité des leaders légitimes, y compris par la force si nécessaire.

• L'application littérale du verset : « Les croyants sont sévères envers les mécréants » (Coran 48:29).

Analysons par là même juridiquement ces Cas.

a) Devoirs Hiérarchisés selon la Charia

Le hadith classique énonce trois niveaux d'action contre l'injustice :

1. Corriger par la main (autorité).

2. Dénoncer par la langue (devoir citoyen).

3. Désapprouver en son cœur (minimum moral)

Les députés, en tant que détenteurs d'autorité (niveau 1), ont une obligation renforcée d'agir concrètement.

b) Immunité Parlementaire et Limites Islamiques

Si la Constitution mauritanienne s'inspire de la Charia, elle doit intégrer la règle coranique :

« Allah ordonne la justice, la bienfaisance et l'assistance aux proches. Il interdit la turpitude, l'acte répréhensible et la rébellion » (Coran 16:90).

Toute loi restreignant la dénonciation des abus serait donc contraire à l'esprit de la Charia, comme le soulignent les oulémas contemporains.

c) Précédents historiques et leur application Moderne

Le comportement des compagnons établit que :

• La dénonciation internationale est licite si l'oppression persiste localement (cf. hijra en Abyssinie voir plus loin dans cet article ).

• Les représailles étatiques (emprisonnement, censure) contre les lanceurs d'alerte violent directement les principes prophétiques..

Déclinaisons Contemporaines en Mauritanie:

Selon la Sharia donc un député mauritanien qui dénonce l’injustice et les discriminations ne fait en tant que musulman qu’appliquer les enseignements de la sainte religion et suivre, comme exemples universels qui résistent à tout droit spoliateur :

• La persévérance d'Abû Bakr face aux quraychites hostiles.

• La stratégie de Aicha combinant plaidoyer public et mobilisation juridique.

2. Obstacles Légaux : Une Violation des Préceptes Islamiques

Les lois restreignant les libertés d'expression contredisent :

• Le verset « Exposez clairement ce qui est injuste » (Coran 4:148)

• La fatwa d'Ibn Taymiyyah : « Celui qui dissimule les crimes des gouvernants trahit Allah et Son Messager ».

Conclusion Théologico-Juridique

Les exemples des compagnons prouvent que l'islam sanctifie le devoir de rébellion verbale contre l'injustice, surtout pour les élus.

La Mauritanie, en criminalisant ces pratiques, s'écarte doublement :

1. De sa Constitution (art. 10 garantissant la liberté d'expression).

2. Des fondements immuables de la Charia (obligation de amr bil ma'rûf).

Seule une réforme alignant le droit positif sur ces principes islamiques authentiques permettrait une conciliation entre souveraineté nationale et impératifs éthiques universelles.

La Hijra en Abyssinie : Preuve Historique de la Légitimité de la Dénonciation Internationale Face à l'Oppression

I. Contexte Historique et Fondements Théologiques

La Hijra (migration) en Abyssinie, en l’an 5 après la Révélation, constitue le premier exode politique et religieux de l'histoire islamique. Face aux persécutions systématiques des Qurayshites à La Mecque, le Prophète Muḥammad (PSL ) ordonna à ses compagnons de chercher refuge auprès du Négus, roi chrétien d'Abyssinie (actuelle Éthiopie).

Cette décision prophétique établit un précédent juridico-théologique majeur : le recours à une autorité non musulmane pour protéger les droits fondamentaux lorsque l'État d'origine persiste dans l'oppression.

Le Coran justifie cette approche par le verset :

« Et quand Mes serviteurs t'interrogent sur Moi... Je suis proche » (2:186), interprété par les juristes malékites comme une injonction à rechercher la justice par tous moyens licites

. La Hijra n'était pas une fuite, mais une stratégie de résistance active visant à préserver la communauté et à internationaliser la cause des opprimés

. II. Mécanismes de la dénonciation transnationale

a) Dialogue avec le Négus : Un Modèle universel de Plaidoyer International

Lorsque les Quraysh envoyèrent une délégation pour exiger l'extradition des réfugiés, Jaʿfar ibn Abī Ṭālib (رضي الله عنه) présenta devant la cour abyssine un exposé structuré des persécutions subies :

1. Détail des tortures physiques et économiques infligées aux convertis.

2. Explication des principes islamiques, incluant le respect de Jésus (ʿĪsā) et Marie (Maryam) pour établir un terrain d'entente théologique.

3. Appel à la protection basée sur la réputation de justice du Négus.

Ce plaidoyer, rapporté dans Ṣaḥīḥ al-Bukhārī (Hadith 7), démontre que l'islam sanctionne le recours à des instances internationales lorsque l'appareil étatique local devient oppresseur.

Le Négus, en tant qu’autorité pourtant étrangère, incarne ici la figure du garant neutre des droits humains universels.

b) Réponse du Négus : Un Arrêt Juridique Précurseur

La décision du roi abyssin constitue l'un des premiers verdicts internationaux en matière d'asile politique :

« Allez, car vous êtes en sécurité sur ma terre. Quiconque vous maltraitera paiera une amende. Personne ne sera lésé tant qu'il vivra sur ma terre »

Ce jugement s'appuie de mon point de vue sur deux principes coraniques anticipés :

1. La primauté du droit à la vie (Coran 5:32).

2. La liberté de conscience (Coran 2:256), bien que non encore révélée à l'époque.

III. Implications Juridiques Modernes

a) Droit International contre Souveraineté Étatique

La Hijra établit que la protection des droits humains prime sur la non-ingérence :

• Les réfugiés mecquois restèrent 13 ans en Abyssinie malgré les pressions qurashites. • Le Négus rejeta l'argument de « menace à la sécurité nationale » avancé par les émissaires qurashites, préfigurant l'article 14 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (1948) .

b) Critères de légitimité d'une dénonciation internationale

Les fuqahā (juristes) ont déduit de cet événement trois conditions pour justifier une dénonciation extraterritoriale :

1. Épuisement des recours internes : Les musulmans avaient tenté en vain de négocier avec les Quraysh.

2. Preuves tangibles d'oppression systémique : Tortures, confiscations de biens, embargos économiques.

3. Objectivité du canal de dénonciation : Choix d'un médiateur neutre (le Négus) plutôt que d'une puissance rivale de La Mecque.

IV. Applications Contemporaines

a) Cas des Ouïghours : Un Parallèle Historique

À l'instar des réfugiés mecquois, les Ouïghours ont utilisé depuis 2017 des mécanismes similaires :

• Pétitions à l'ONU et à l'OCI basées sur des preuves documentées.

• Mobilisation de la diaspora pour alerter sur les camps d'internement au Xinjiang. Ce mouvement s'inscrit dans la lignée directe de la Hijra, combinant exil forcé et plaidoyer transnational.

b) Mauritanie : Leçons pour les Députés mauritaniens

L'exemple abyssin éclaire le dilemme des parlementaires mauritaniens confrontés à des lois répressives.

Ibn Hishām et Ṭabarī confirment que le Prophète (PSL) recommanda explicitement l'Abyssinie pour sa justice institutionnelle, non pour sa confession.

Ainsi donc si la Hijra en Abyssinie, peut à nos yeux de musulmans illustrer quelque chose c’est bien qu’elle constitue bien un paradigme juridique complet pour les peuples opprimés :

1. Légitimation théologique de l'asile politique même en territoire non musulman.

2. Cadrage éthique de la dénonciation internationale (preuves, modération, médiation).

3. Primauté des droits humains sur les considérations géopolitiques.

LES DEPUTES D'ABYSSINIE.

Ainsi, pour conclure je dirai que l’analyse juridique, constitutionnelle et théologique démontre clairement que les députés mauritaniens ont non seulement le droit mais aussi le devoir moral et religieux de dénoncer les injustices, y compris à l'étranger. Ce devoir découle à la fois:

1. Du système moniste mauritanien qui incorpore les traités internationaux de droits humains dans l'ordre juridique interne;

2. Des principes islamiques fondamentaux qui imposent l'obligation de lutter contre l'injustice;

3. Du mandat représentatif des députés qui les engage à défendre les intérêts de leurs électeurs.

Cependant, l'exercice de ce droit se heurte dans la pratique à des restrictions significatives et à un climat de coercition qui contredisent les engagements constitutionnels et internationaux de la Mauritanie.

Cette contradiction entre principes et pratique représente un défi majeur pour la démocratie mauritanienne et le respect effectif des droits fondamentaux dans le pays.

Le cas des députés qui dénoncent l'injustice en Mauritanie illustre un dilemme universel entre la souveraineté nationale et les obligations universelles en matière de droits humains, entre la loyauté envers les institutions et le devoir moral, envers ceux qui les ont élus, de dénoncer leurs défaillances, particulièrement lorsque des violations graves des droits fondamentaux sont en jeu.

Le droit mauritanien, écartelé entre impératifs islamiques et obligations internationales, génère un cadre paradoxal pour les députés.

Si la Charia et la Constitution leur imposent éthiquement de dénoncer les injustices, les outils juridiques actuels entravent cette mission.

Seule une réforme courageuse, intégrant les leçons des Compagnons du Prophète et des mécanismes internationaux de justice reconnus par la Mauritanie, pourrait transformer les parlementaires, puisque la voix du peuple, soit des opprimés et des laissées pour compte, en somme de leurs électeur; en véritables « Gardiens de la Justice » (Hâfiz al-ʿAdl), selon l'idéal prophétique.

Il n’en tient qu’à l’Etat en modulant son mode gouvernance en ouvrant des espaces médiatiques libres et responsables publics et privés de remédier à cette recherche par les députés de médiums internationaux pour s’exprimer. En sommes faire que nos députés ne soient plus des députés mauritaniens…en Abyssinie.

Et tout bon juriste sait que la règle de droit n’est que l’expression de valeurs sociales d’une société donnée à un moment donné de son histoire. Or seul Dieu est éternel.

Et au-delà des apparences, Dieu connaît mieux celui qui s'est égaré de son chemin, et il connaît mieux ceux qui sont guidés.

Aussi appelle au droit chemin de ton seigneur par la sagesse, la foi et la bonne parole. En Mauritanie...en Abyssinie, partout où la voix juste porte. N'est-ce pas là l'essence même de l'Islam? Et la finalité du droit.

ٱدْعُ إِلَىٰ سَبِيلِ رَبِّكَ بِٱلْحِكْمَةِ وَٱلْمَوْعِظَةِ ٱلْحَسَنَةِ ۖ وَجَٰدِلْهُم بِٱلَّتِى هِىَ أَحْسَنُ ۚ إِنَّ رَبَّكَ هُوَ أَعْلَمُ بِمَن ضَلَّ عَن سَبِيلِهِۦ ۖ وَهُوَ أَعْلَمُ بِٱلْمُهْتَدِينَ. (صدق الله العظيم)

Pr ELY Mustapha



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Commentaires (6)

  • kaykouta (H) 01/04/2025 19:32 X

    Ould Sidialy, Le professeur ELY est une pointure internationale. Nous le lisons depuis des années ici. il nous éclaire et son intégrité morale et intellectuelle en font un patriote et un exemple pour tous .Respect pour lui. Pas la peine d'en rajouter une couche. Il a tout dit.

  • ouldsidialy (H) 27/03/2025 19:51 X

    Allez , j' ai du temps libre et je n'ai pas soif, j'en rajoute une couche.

    1) La tournure d'esprit de l'auteur de ce texte vient peut-être du fait qu'il est juriste. Pas notoirement en FIKH mais en beaucoup d'autres matières juridiques. Les juristes aiment à oublier que le droit et la justice sont chronologiquement et hiérarchiquement seconds dans l'établissement des sociétés humaines. L'Ordre primordial dans les affaires humaines est le résultat de l'action simultané d'un rapport de forces violant et de négociations atténuantes de la violence. Au départ, il n'y a ni droit, ni loi , ni justice à invoquer . Ensuite le résultat négocié de la violence se matérialise par des accords et conventions qui peuvent rester en l'état ou se raffermir par des droits et des lois qui s'étoffent en un système de justice. Une fois admis , le droit est un outil essentiel de gouvernement de la société, PAS un élément constitutif préalable à sa formation, indispensable à sa pérennité ou intangible. Cette situation est vraie à tout moment de changement d'Ordre, on ne parle donc pas ici des hommes préhistoriques, mais bien du moment présent et sans doute futur et pour longtemps.

    2) La justice est souhaitée par les personnes parce qu' elle restreint la violence de premier degré , tant celle des autres personnes que celle de l'ordre lui-même. Elle sécurise des acquis que les personnes n'ont plus à regagner à chaque fois.

    La justice est aussi souhaitée par l' Ordre parce qu'elle disqualifie la contestation de premier degré ( La rébellion violente) et organise la contestation admise . L'Ordre devient plus supportable dans ces violences de second degré; sa contestation moins couteuse, pour toutes les parties, parce que régulée par le droit. La justice et le droit rendent soutenable et durable l'Ordre établi et font qu'il est mieux supporté.

    Renégocier l'état du droit est normal et même souhaitable et parfois souhaité par l' 'Ordre local ou international. Ici , l'auteur se laisse aller à l' apparence d'une thèse sérieuse qui rentre dans le cadre normal d'une négociation/ contestation de l'état de la justice dans son pays. La démonstration adopte une approche duale classique dans les pays musulmans d'Afrique; avec recours au droit international et aux sciences du droit musulman. Ce qui pourrait être opposé à cette thèse serait que son auteur n'ait pas de légitimité en FIKH. Elle ne saurait donc prétendre à faire autorité. Mais ce genre de chose n'est pas souvent remarqué.

    Une erreur fréquente des justiciables et des Etats ( y compris puissants) est de croire qu'ils peuvent utiliser la justice pour remettre en cause fondamentalement l'Ordre national ou international. Ils peuvent négocier des évolutions jusqu'à un certain point . Au-delà il faut revenir à la situation primordiale : réécrire l'ordre par la violence négociée. C'est ce que font les Etats de temps à autre, par la guerre et les peuples par les rébellions.

    La justice et le droit ne sont donc PAS conçu pour renverser un Ordre établi !! j'en suis désolé pour les "révolutionnaires constitutionnels" . Mais il est important de le rappeler en Afrique où l'on a parfois le sentiment que des gens se trouve engagée dans des processus "révolutionnaires" en pensant y arriver par des moyens à faible coût.

    3 ) On remarque que les sociétés veillent à garder en dehors du champ d'action de la justice un grand nombre d'occurrences. Soit en ne légiférant pas , soit en ne recourant pas au droit. Ce principe est voulu par les peuples et accepté par l'Ordre. L'Ordre sait que la justice aurait tendance à vouloir prendre le pouvoir. Le peuple sent que la justice est porteuse d'un potentiel de tyrannie. Laisser aux coutumes, au vide juridique, aux non-droits, c'est aussi laisser à la liberté.

    4) L'expertise des humains pour eux- mêmes, sait aussi que certaines injustices sont nécessaires à l'équilibre social, que certaines revendications de justice parfaitement justifiées sont aussi les prolégomènes à des volontés d'oppressions injustes etc. Ces points sont ceux qui permettent aux pouvoirs politiques de justifier leurs ingérences dans la justice. Il n'existe en effet aucun pourvoir politique sans influence sur le judiciaire. De même, qu'il n'existe aucun pouvoir judiciaire séparé des mentalités de son peuple et de son temps. L'Idée qu'il faille éradiquer de la justice les "sensibilités injustes" d'un peuple est non seulement impossible mais serait également catastrophique pour le pays concerné.

  • ouldsidialy (H) 27/03/2025 18:57 X

    On aura remarqué ici comme ailleurs, que je discours sur des principes de façon précise, je fais des affirmations parfois audacieuses sur des questions complexes, MAIS on remarquera aussi que j'évite d'étayer mes propos de citations ou livresques et encore davantage d'en faire les éléments d'une démonstration. Je souhaite éviter de laisser croire que je FAIS THESE. J'ai comme chacun bien le droit de vouloir partager ou même convaincre de mes opinions mais je ne me permet pas de vouloir donner une AUTORITE à des choses pour lesquelles je n'ai pas de légitimité professionnelle, académique, morale ou religieuse. Si au moins j'étais étudiant en Fikh ou notoirement connu pour être un piétiste sans beaucoup d'instruction , ou encore un thésard en droit; je pourrais avoir une excuse à penser qu'accéder à des connaissances autorise à donner l'impression que l'on a fait une thèse sérieuse. Mais je sais la différence entre métier et instruction, liberté d'expression et légitimité d'une parole.

  • ouldsidialy (H) 27/03/2025 12:51 X

    L' Auteur de l'article a suffisamment d'esprit critique pour comprendre ce qui suit et d'autres que lui assez d'expérience de la lecture critique des textes pour l'aider amicalement à ne pas se fourvoyer de bonne foi.

    1 ) Une thèse est toujours recevable lorsqu'elle pose clairement ses axiomes ou postulats et se construit de façon cohérente vis-à-vis de ceux-ci. Par définition un postulat est une hypothèse plausible et intuitivement acceptable, qui fait l'économie de sa démonstration. Un postulat peut donner l'impression d'être démontré en s'appuyant sur d'autres postulats déjà admis comme vrai par l'opinion , alors qu'ils ne sont que des postulats eux-mêmes. Le procédé serait immédiatement réfuté par un mathématicien. En Mathématiques , un axiome non démontré peut être admis mais reste un axiome.

    2 ) Une raison fréquente de la fausseté d'une thèse est lorsqu'elle pose un ou plusieurs postulats qui sont faux ou faussement tautologiques. En mathématiques, on sait que l'on peut en tirer des résultats vrais ou faux mais on est rassuré car les résultats seront de toute façon confrontés au mur du concret expérimental ; lequel tranche définitivement.

    Il en est de même pour la pensée sociale et politique, mais hélas le mur est souvent DRAMATIQUEMENT détecté trop tard. Cela se produit lorsque des axiomatiques fausses ont pris le pouvoir et parfois entrainé des millions de morts ou des destructions importantes.

    Pour ce genre de papier, le lecteur et l'auteur peuvent adhérer à cause de la mécanique de cohérence des arguments. Les thèses par postulats ne sont pas blâmables et sont utiles mais conduisent souvent à des erreurs graves voire à des tromperies sociales et politiques; d'abord pour leurs auteurs. L'article commenté fait prendre ce genre de risque.

    3) A mon tour, je propose un postulat " Il est FAUX de penser que le principe premier, l'objectif final et le paradigme fondateur de la religion ou de l'organisation sociale est LA justice."

    Je ne chercherai pas ici à le démontrer puisqu'un postulat n'oblige pas à démonstration en toutes circonstances. Mais qui prend le temps de réfléchir ou a déjà réfléchi trouvera à ce postulat du sens et des plausibilités.

    exemples :

    - Côté temporel, il suffit de voir que l'Ordre est pré séant, préalable et indispensable à la possibilité de justice. C'est ainsi que l'affirmation selon laquelle " le contrat social national, basé sur la justice, l'équité et la transparence » serait obligatoire devient FAUSSE lorsqu'on la comprend comme principe premier et indispensable à l'Ordre social. En revanche, la justice est cohérente et indispensable à tout Ordre qui veut se donner une chance de s'accomplir de façon durable, au plus près de ses intérêts. On voit ici que le postulat dit que la justice est UN OUTIL pour l' Ordre et PAS son fondement !!!!!

    On voit aussi que ce postulat est moins sympathique que celui posé dans l'article. Sauf que ce qui est vrai n'est pas forcément sympathique et ce qui est sympathique est parfois illusoire. Exemple: La mort nous attend tous mais l'idée de vivre en bonne santé jusqu'à 100 ans nous séduirait tous !!!!

    - Côté rapport de la religion au temporel , les croyants voient tout de suite l'évidence suivante: L'alpha de la foi est LA grâce et son objet est l'adoration divine. Toutes deux n'ont pas besoin de justice au sens humain, pour exister .L''oméga est le paradis qui n'est pas non plus tautologiquement espéré selon les logiques humaines. Il suffit de se rappeler que la foi et le salut ne sont pas donnés ou retirés selon la situation de justice ou d'injustice où se trouvent la personne, la société ou l'Etat . Les croyants savent aussi que la finalité de la mission de l'homme n'est PAS l'établissement de la justice sur terre . Plus prosaïquement, c'est une des raisons pour laquelle certains politiques religieux ou antireligieux sont agacés par les piétistes. Ils ne leur donnent jamais "la bonne prise" qu'ils souhaitent. On sait aussi comment les politiques savent infiltrer le piétisme ou tout simplement utiliser les postulats religieux admis pour développer leur axiomatique laïc.

    Cela n'a finalement pas grande importance pour peu que chacun fasse ses choix sans tromper sa propre personne et ceux qu'ils aiment.

    Par ailleurs, l'observation montre aussi qu'il n'y a PAS de proposition POLITIQUE qui ne mette en avant La justice. Faites le tour : théocratie, démocratie , monarchie , autoritarismes, aucune idéologie ne met en cause le besoin de justice et toutes y donnent leurs réponses. Mais La politique est primordialement une proposition d'Ordre social pas une proposition de justice.

    On remarque néanmoins que de nombreuses TYRANNIES se construisent initialement sur une base idéologique où la justice sociale est particulièrement mise en avant. Cela devrait faire réfléchir sans affaiblir notre désir de justice mais sans nous laisser piégés par lui.

  • pyranha (H) 26/03/2025 23:42 X

    Maham68, dommage que les fourbes mènent la barque et le naufrage aura incontestablement lieu, quand ? Comment ? Seul Dieu le sait , mais il aura lieu .Ce Ely Moustapha est une providence pour ce pays , mais certains cadres étant hypocrites pour faire bouclier autour de ce Ely un cerveau sur tous les plans, beaucoup d'occasions seront perdues pour mettre ce pouvoir dans les oubliettes.

  • maham68 (H) 26/03/2025 16:51 X

    Le Pr Ely est une chance pour la Mauritanie.