07-04-2025 20:16 - Contrôles stricts et tribunaux spécialisés : le nouveau visage de la lutte anti-migration en Mauritanie

Contrôles stricts et tribunaux spécialisés : le nouveau visage de la lutte anti-migration en Mauritanie

Sahara Médias - Dans une salle d’audience fermée et silencieuse, le juge a demandé à l’avocat de l’accusé dans l’affaire du « trafic de migrants irréguliers » de présenter son argumentation.

Celui-ci a commencé par dire que son client « a été entraîné dans un dossier avec lequel il n’avait rien à voir, et que les enquêtes et les rapports de police n’ont pas prouvé avec des preuves concluantes qu’il était impliqué dans le trafic d’êtres humains ».

Depuis des mois, l’avocat Moulay Hafez mène une bataille judiciaire qu’il qualifie de différente des affaires habituelles, après avoir été engagé par l’un des accusés dans une affaire de trafic d’êtres humains, affirmant que « son client n’était pas impliqué dans le trafic ou l’hébergement de migrants ».

Il a ajouté dans un entretien avec Sahara Media que l’arrestation de son client est intervenue dans le contexte de l’accueil à l’aéroport d’un groupe d’étrangers entrés légalement dans le pays, après avoir obtenu des visas d’entrée et fait tamponner leurs passeports par la police de l’aéroport.

Il a indiqué que l’affaire est actuellement devant la justice et qu’une audience devrait se tenir à la fin de ce mois pour statuer sur un dossier qui a suscité beaucoup de controverses en Mauritanie.

Au cours des derniers mois, le gouvernement mauritanien a démantelé des dizaines de réseaux transfrontaliers actifs dans le trafic de migrants vers le pays à travers des points de illégaux.

En mars, alors que la campagne de sécurité atteignait son paroxysme, le gouvernement a annoncé le démantèlement de quatre réseaux d’immigration clandestine vers l’Europe, dont les membres étaient de différentes nationalités.

Le ministre des affaires étrangères, de la coopération et des Mauritaniens de l’étranger, Mohamed Salem Merzoug, a déclaré qu’il existait des réseaux organisés travaillant à encadrer les migrants clandestins et à faciliter leurs déplacements.

La répression a abouti à l’arrestation de centaines de migrants clandestins, originaires pour la plupart d’Afrique subsaharienne, qui sont détenus dans des centres d’hébergement spécialisés en attendant d’être expulsés vers leur pays d’origine.

Ceinture de sécurité

Il y a deux mois, les autorités ont publié une circulaire à l’intention des conducteurs de véhicules et des sociétés de transport, mettant en garde contre le transport d’étrangers qui n’ont pas de documents de résidence légale dans le pays, soulignant que « tout véhicule trouvé transportant un étranger entré illégalement dans le pays sera arrêté et confisqué ».

Dans une station de transport de passagers située à l’est de la capitale Nouakchott, les chauffeurs vérifient désormais l’identité des passagers et de leurs bagages, une procédure devenue routinière, selon le chauffeur Mokhtar qui travaille sur l’axe Nouakchott- Magta Lahjar, confirmant la présence de points de contrôle fixes et mobiles de la gendarmerie et de la police le long de la route, affirmant que les fouilles sont devenues plus strictes.

Il ajoute qu’au niveau de certains points de contrôle l’attente peut durer plus de quinze minutes, pendant lesquelles les identités des voyageurs sont vérifiées et les bagages fouillés avant d’être autorisés à continuer.

Selon le chauffeur, la circulation des étrangers entre les villes mauritaniennes a sensiblement diminué au cours du mois de mars par crainte d’être arrêtés, ajoutant que certains chauffeurs refusent de transporter des étrangers, même s’ils sont en situation régulière, par crainte d’être arrêtés.

Entre les deux rives

Sur la rive mauritanienne du fleuve Sénégal, dans la ville de Rosso, les autorités ont procédé à l’expulsion de dizaines de migrants irréguliers vers l’autre rive du fleuve, à savoir vers la ville sénégalaise de Rosso, devenue récemment un important point d’accueil pour les personnes expulsées du territoire mauritanien.

Parmi les expulsés se trouvaient des migrants qui résidaient légalement dans le pays et possédaient des permis de séjour, mais certains n’ont pas renouvelé leur carte, ce qui a conduit à leur arrestation aux points de contrôle et à leur expulsion.

En 2022, le gouvernement mauritanien a lancé un recensement complet des étrangers vivant dans le pays, dans le but de leur fournir des cartes de séjour légales, mais les enregistrements sont restés limités, le gouvernement affirmant que peu de personnes se sont inscrites auprès des bureaux de recensement.

Selon le porte-parole du gouvernement, le ministre Al Hussein Ould Medou, les statistiques officielles indiquent qu’environ 130 000 migrants sont entrés dans le pays depuis 2022, mais que seuls 7 000 d’entre eux ont demandé à régulariser leur statut juridique.

Bien que les médias indiquent que les migrants sont « expulsés de manière inhumaine », le gouvernement mauritanien affirme lui que les expulsions sont effectuées conformément aux lois locales et aux conventions internationales ratifiées par le pays.

Dans une déclaration à la presse le mois dernier, le ministre mauritanien des affaires étrangères Mohamed Salem Ould Merzoug a déclaré que la mission principale des forces de sécurité était de « sécuriser la population et le territoire », soulignant qu’elles respectaient toutes les conventions internationales sur les droits de l’homme dans l’exercice de leurs fonctions.

Dissuasion juridique

L’expulsion des migrants irréguliers est une décision souveraine qui ne peut être compromise, selon le gouvernement mauritanien, ce qui l’a incité à renforcer son arsenal juridique et à mettre en place des tribunaux spéciaux pour poursuivre les réseaux de passeurs.

En février, la Mauritanie a inauguré un nouveau tribunal spécialisé dans les affaires de migration, dans le cadre d’une stratégie nationale de lutte contre l’immigration clandestine.

La loi relative à la régulation et à la lutte contre la migration prévoit « des peines d’emprisonnement de six mois à deux ans pour quiconque fait usage de faux documents, ou les obtient avec une fausse identité ou de fausses données d’état civil, de même que pour ceux qui confectionnent de faux visas consulaires, de fausses cautions, de faux contrats de travail ou de fausses cartes d’identité étrangères ».

La loi prévoit la possibilité d’expulser les étrangers qui enfreignent la législation mauritanienne sur l’immigration et le séjour, et de leur interdire l’entrée pour une période allant de un à dix ans, à la discrétion des autorités compétentes.

Elle prévoit également des amendes pouvant aller jusqu’à 5 millions MRO (environ 13 000 dollars) et des peines de prison allant de deux à six mois pour ceux qui entrent dans le pays en dehors des points de passage officiels, ou qui résident dans le pays d’une manière qui enfreint les lois.

Plus récemment, mercredi 2 avril, le gouvernement a approuvé un projet de loi sur la protection des victimes, de leurs familles et des témoins dans les cas de traite des êtres humains.

Le gouvernement a déclaré que ce texte permettra la mise en place de mécanismes de protection et d’assistance pour les victimes de la traite des personnes, leurs familles, les témoins, les officiers de justice, les informateurs confidentiels et les dénonciateurs.

Le projet de loi prévoit une protection physique, psychologique et juridique, ainsi qu’une assistance judiciaire, une immunité de poursuite, la confidentialité des procédures, le droit à l’anonymat de la victime, et la protection des enfants par le secteur chargé des affaires sociales, de l’enfance et de la famille.





Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


Commentaires : 0
Lus : 1220

Postez un commentaire

Charte des commentaires

A lire avant de commenter! Quelques dispositions pour rendre les débats passionnants sur Cridem :

Commentez pour enrichir : Le but des commentaires est d'instaurer des échanges enrichissants à partir des articles publiés sur Cridem.

Respectez vos interlocuteurs : Pour assurer des débats de qualité, un maître-mot: le respect des participants. Donnez à chacun le droit d'être en désaccord avec vous. Appuyez vos réponses sur des faits et des arguments, non sur des invectives.

Contenus illicites : Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes ou antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d'une personne, utilisant des oeuvres protégées par les droits d'auteur (textes, photos, vidéos...).

Cridem se réserve le droit de ne pas valider tout commentaire susceptible de contrevenir à la loi, ainsi que tout commentaire hors-sujet, promotionnel ou grossier. Merci pour votre participation à Cridem!

Les commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité.

Identification

Pour poster un commentaire il faut être membre .

Si vous avez déjà un accès membre .
Veuillez vous identifier sur la page d'accueil en haut à droite dans la partie IDENTIFICATION ou bien Cliquez ICI .

Vous n'êtes pas membre . Vous pouvez vous enregistrer gratuitement en Cliquant ICI .

En étant membre vous accèderez à TOUS les espaces de CRIDEM sans aucune restriction .

Commentaires (0)